Placée à l’origine dans les codex, l’enluminure a principalement été encadrée et reléguée sur les murs lorsque cette pratique a décliné. Or, prenant le contre-pied de cette tendance, je me suis attachée à faire évoluer mes œuvres du mural vers l’objet d’art, développant ainsi une enluminure nomade, libérée des murs. Créations qui, à l’instar de nos intérieurs contemporains modulables, pourraient modeler leur présentation en fonction de leur environnement. Le concept m’a menée vers divers types de créations, par exemple des plaques de verre enluminées sur socle (en béton) dont l’intérêt réside dans le jeu avec l’éclairage indirect et la possibilité de les déplacer facilement grâce à leur socle. Toujours dans la volonté de transformer l’œuvre en un objet maniable, j’ai présenté des enluminures recto verso dans des vases — avec ce que cela suppose de protection et de facilité à bouger. Une de ces enluminures en vase, un petit arbre en or, a inspiré le développement de grands panneaux décoratifs recto verso (cf. Alcyonaire ci-contre) pouvant autant être accrochés aux murs que suspendus au milieu d’une pièce, telle une cloison aérienne. L’enluminure se fait objet d’art et s’adapte à une décoration en perpétuelle évolution.
le stuc enluminé
La volonté de faire de l’enluminure un objet d’art s’illustre dans mes galets de stuc enluminés. Si ce choix peut étonner, il est pourtant en parfaite cohérence avec mon travail. En effet, malgré les apparences, un lien unit le parchemin et le stuc, créant ainsi une continuité dans ma création : la douceur du matériau. Le stuc recrée la sensualité du contact du parchemin. Les veines et les marbrures du stuc, de par leur aspect brut, forment un contraste étonnant et pourtant élégant avec le luxe dégagé par la pureté de l’or ou de l’argent, l’éclat des pigments ou du corail et l’alliance inédite avec le parchemin.
En tant qu’objet, la sculpture de stuc enluminée est à la fois une œuvre d’art et son propre présentoir. Très légère, elle peut aisément être transportée. Selon leur taille, posés sur une table ou à même le sol, détails discrets ou éléments clés d’une pièce, ces galets de stuc, tous différents, me permettent un rare éclectisme dans la création. Après avoir travaillé sur plusieurs tailles de sculptures, j’ai relevé le défi d’enluminer des galets monumentaux d’un mètre de long, pièces uniques à la richesse incomparable. Dernièrement, j’ai décidé de les suspendre afin de donner l’impression qu’elles flottent dans les airs. Le contraste entre leur légèreté et leur aspect rocheux n’en est que plus saisissant !